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Mouvements n°11 : Le logement : enjeu de classe

Céline Caudron

Le logement à Bruxelles en quelques chiffres, c’est 60% de locataires, 52.000 personnes en attente d’un logement social, 5.000 sans abris, 4.000 expulsions judiciaires par an, … Un paysage dans lequel le mal logement est répandu dans les classes populaires, particulièrement celles reléguées dans les quartiers du « croissant pauvre » du nord-ouest de la capitale.  

Le droit au logement décent est pourtant inscrit dans la constitution. Mais le droit à la propriété privée l’est aussi. Depuis longtemps, les choix politiques font primer ce dernier, en faisant du logement une marchandise comme une autre sur un marché particulièrement lucratif pour certains. De gros propriétaires bailleurs, ainsi que des fonds d’investissement internationaux n’ont aucun scrupule à acheter des immeubles et des terrains, détruire et (re)construire, pour louer et puis revendre avec de belles plus-values au passage et, évidemment, sans se soucier aucunement d’une ville vivable et accessible.   

Ainsi, ces 10 dernières années, les loyers ont augmenté de 20% au-delà de l’indexation, engouffrant parfois de 60 à 70% des revenus des locataires, obligé.e.s de se priver de soins de santé, d’une alimentation saine ou de loisirs et de vie culturelle. Les logements sociaux, qui proposent un loyer adapté aux revenus, sont vétustes et trop peu nombreux. Le droit à un logement décent est dès lors ineffectif pour des milliers d’habitant.e.s, contraint.e.s de rester dans un logement trop petit, insalubre, mal isolé, quand iels ne doivent pas se résoudre à l’errance. 

L’enjeu est aussi environnemental puisque, à Bruxelles, les émissions de CO2 des bâtiments représentent 54% des émissions totales et près d’un logement sur deux peut être considéré comme une passoire énergétique. Pour l’instant, les aides publiques à la rénovation peuvent être sollicitées sur base volontaire, à travers des démarches administratives peu accessibles, un dispositif totalement insuffisant pour garantir le plus vite possible une bonne isolation du bâti et des logements. De plus, sans aucun mécanisme de gel des loyers, ceux-ci risquent encore d’augmenter dans les logements rénovés en évinçant les locataires les plus pauvres. 

A Bruxelles et en Europe, les mobilisations pour le droit au logement et le droit à la ville reprennent vigueur, particulièrement depuis le confinement avec notamment le Front anti-explusion ou Action Logement Bruxelles. Et c’est tant mieux parce qu’il est urgent de sortir le logement des griffes du marché et de remettre la ville aux mains de ses habitant.e.s, d’imposer une baisse et un encadrement des loyers, de concrétiser un plan ambitieux d’isolation/rénovation des bâtiments, de renforcer et d’améliorer le parc de logements sociaux, d’interdire les expulsions, de penser une architecture et un urbanisme adaptés aux besoins sociaux et à l’urgence climatique, en favorisant des espaces de vie collectifs d’entraide et de solidarité.  

Parce qu’il en va de l’amélioration de nos conditions de vie, le mouvement ouvrier a un rôle important à jouer dans le renforcement de ces luttes, en soutenant le travail mené par les Equipes Populaires notamment et contribuant à l’articulation étroitement des combats syndicaux, féministes et écologistes.

Mouvements est la revue trimestrielle du Ciep-MOC Bruxelles.

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