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Chou 105 – Bruxelles, le monde en petit

Edito

Myriam Djegham
Secrétaire fédérale du CIEP-MOC Bruxelles

Mes parents se sont rencontrés à Bruxelles bien que n’étant Bruxellois ni l’un ni l’autre. Je n’y suis moi-même arrivée qu’adulte. Pourtant je me sens bruxelloise. Comme beaucoup de Bruxellois, j’étais d’ailleurs et je suis maintenant d’ici. Bruxelles, c’est une population relativement jeune et du monde entier, des eurocrates polyglottes et des chômeurs peu qualifiés parlant de multiples autres langues, des quartiers surpeuplés aux ambiances d’ailleurs et des zones résidentielles aux allures, des navetteurs pressés de quitter la ville et des mamans seules pressées d’arriver avant la fermeture de la crèche, l’immobilité sur les routes et la verdure des grands arbres dans les parcs, des bâtiments porteurs d’histoire et des tours abritant des institutions, une vie sociale à toute heure et des inégalités sociales à tout va, c’est aussi un certain anonymat sans atteindre la déshumanité de grosses métropoles.

Petite enclave au cœur de l’Europe dans un monde qui s’y reflète, Bruxelles est traversée par des rapports de domination, liés au capitalisme, au patriarcat et au racisme, qui se renforcent mutuellement. L’emploi devient tertiaire et précaire, et une partie des femmes, des jeunes et des personnes racisées s’en trouve tantôt exclu.es, tantôt plus exploité.es encore. Les loyers augmentent et les revenus baissent pour se retrouver 22% en dessous de la moyenne belge. La gentrification accentue la ségrégation spatiale. Le racisme se diffuse dans la rue, les entreprises et les institutions. L’école, prise au piège des logiques de marché, maintient voire renforce les inégalités au lieu de faire grandir l’égalité. Des hôpitaux se concentrent dans la Région, mais beaucoup de Bruxellois postposent leurs soins faute de moyens. Les classes populaires et plus largement les travailleur.se.s, ne peuvent sortir de ce système qu’en se mobilisant contre les forces qui l’entretiennent. Parce que tou.te.s les Bruxellois.es n’ont pas les mêmes intérêts, certains étant antagonistes, il s’agit pour nous de poser un diagnostic précis, de définir notre projet pour Bruxelles et de le défendre avec détermination.

A la veille des élections communales et à l’approche d’une période où les propositions politiques vont fuser dans tous les sens pour les autres niveaux de pouvoir, chaque parti cherche à valoriser son programme pour accéder au pouvoir après mai 2019. Aussi voulons-nous entamer, avec ce numéro du Chou, une réflexion sur les enjeux bruxellois du point de vue qui est le nôtre, celui d’organisations sociales de Gauche.

Exceptionnellement, j’ai commencé cet édito de manière très personnelle. Je le finirai sur le même ton. Après 21 ans, un bail ! je quitte l’équipe pour aller, pas très loin…, à la CNE. Les attaques politiques et patronales contre les travailleur.se.s nous obligent à réinventer les pratiques syndicales. Je veux mettre ce que j’ai appris pendant mon passage au MOC au service des militant.e.s dans les entreprises et confronter nos théories de l’action collective au réel. Et le faire à Bruxelles, aux côtés notamment des travailleuses du commerce qui sont au cœur de la triple domination, est un prolongement cohérent de mon engagement à vos côtés. Rendez-vous à la prochaine grève générale !

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